Biographie


Jeunesse en Bretagne

Paul Henry Corentin Féval est né à Rennes le 29 septembre 1816, à « trois heures et demie du soir » (trois heures et demie de l’après-midi). Son père, Jean Nicolas Féval, est un avocat originaire de Châtillon-sur-Marne. Sa mère, Joséphine-Jeanne-Renée Le Baron de Létang, est issue d’une famille noble bretonne : le grand-père maternel de Joséphine, Henri François Potier de La Germondaye (1729-1797), était un magistrat au Parlement de Bretagne. Quant à l’un des cousins de Paul Féval, Auguste de Foucher de Careil, il épouse Caroline Surcouf, la fille du célèbre corsaire Robert Surcouf.

 

Paul est le dernier d’une famille de six enfants. Il a trois sœurs : Jeanne-Marie-Hélène, Nathalie-Louise et Virginie-Jeanne (cette dernière est morte en bas-âge avant la naissance de Paul), et deux frères : Auguste-Marie-René et Louis-Edouard. Son père, surchargé de travail, meurt alors que Paul n’a que onze ans.

En 1830, la Révolution de Juillet éclate : la France est alors divisée entre les Légitimistes (partisans de Charles X et de son fils Henri de Chambord) et les Orléanistes (partisans de Louis-Philippe Ier). Les Féval sont Légitimistes et au collège, le jeune Paul ne s’en cache pas, ce qui finit par déclencher des bagarres avec d’autres collégiens Orléanistes. Il est alors renvoyé et sa mère l’envoie passer quelques semaines chez son cousin, le comte Auguste de Foucher de Careil. Là, le jeune garçon découvre les légendes bretonnes, les récits d’anciens chouans et les partisans Légitimistes, qui inspireront une grande partie de ses récits : il mentionnera d’ailleurs cet épisode de sa vie dans Madame Gil Blas, dont l’héroïne, Suzanne Lodin, assiste à une tentative d’insurrection de la part des Légitimistes en Vendée.

Des débuts difficiles

Destiné à une carrière d’avocat, comme son père et plusieurs membres de sa famille, Paul Féval fait ses études de droit à Rennes : il obtient son baccalauréat en 1833 et sa licence en 1836. Mais après une première plaidoirie désastreuse, le jeune homme décide d’abandonner la carrière d’avocat.

 

Il monte à Paris, où il exerce toutes sortes de petits métiers pour joindre les deux bouts. Il s’inspirera de cette époque pour décrire les déboires de Suzanne Lodin, l’héroïne de Madame Gil Blas, que l’on pourrait presque qualifier de double féminin de Féval : il commence par être employé dans une banque, dont il ne tarde pas à se faire renvoyer, se fait arnaquer par un ancien camarade de collège, travaille avec le directeur d’un journal qui s’enfuit avec l’argent, se fait engager dans une compagnie d’affichage qui le renvoie sans le payer, est embauché par un journal, Le Nouvelliste, qui ne tarde pas à faire faillite…

 

Mais Paul a un rêve : devenir écrivain. Comme ses textes ne sont pas publiés (« Vous n’êtes pas connu ! », lui expliquent les directeurs de journaux !), il commence par travailler comme « nègre littéraire ». Il finit par être introduit dans le milieu des journaux catholiques et royalistes par le doyen de la Faculté des lettres, à Rennes, et commence à publier quelques textes. C’est Le Club des phoques, un roman court, qui attire l’attention des directeurs de journaux. Le récit sera suivi de romans tels que Rollan Pied-de-Fer, Les Chevaliers du firmament (réédité sous le titre Les Fanfarons du Roi) et La Forêt de Rennes, ou le Loup Blanc (Féval expliquera plus tard que Le Loup Blanc est son premier roman).

Le succès

En 1843, Anténor Joly, directeur du Courrier français, demande à Féval d’écrire un roman intitulé Les Mystères de Londres. Les célèbres Mystères de Paris, d’Eugène Sue, ont connu un tel succès qu’Anténor Joly a bien l’intention d’en profiter ! Féval se met au travail et le succès est bientôt au rendez-vous. Pour mieux se documenter, le jeune auteur part pour l’Angleterre, où il rencontre Daniel O’Connell, un leader indépendantiste irlandais, qui lui inspirera un autre roman, La Quittance de minuit.

 

Très vite, Paul Féval enchaine les succès. Mais il en paye le prix : contraint d’écrire toujours plus pour répondre aux attentes du public et généralement boudé par la critique, qui considère le roman-feuilleton comme une littérature médiocre indigne d'éloges, il finit par sombrer dans la dépression.

 

Soigné par un médecin homéopathe, le Docteur Guillaume Auguste Pénoyée, il guérit  et épouse la fille de ce dernier, Françoise-Joséphine-Euphrasie, le 4 mars 1854. Près de dix mois plus tard, le 29 décembre 1854, naitra une petite fille, Joséphine-Jeanne-Marie Féval, la première de huit enfants (quatre filles et quatre garçons !)

Les enfants du couple Féval

Joséphine Jeanne Marie Louise Féval, née le 29 décembre 1854, Paris III, deviendra religieuse à la fin des années 1870.

Auguste Jean Nicolas Féval, né le 5 mai 1858, Saint-Cloud.

Paul Auguste Jean Nicolas Féval, né le 25 janvier 1860, Paris III, deviendra à son tour écrivain sous le nom de Paul Féval fils.

Marie Josèphe Louise Féval, née le 24 mars 1862, Paris XI, deviendra religieuse comme sa sœur aînée.

Jeanne Marie Anne Thérèse Féval, née le 24 septembre 1863, Paris XI.

Jean Nicolas Paul Vincent Féval, né le 27 janvier 1866, Paris XI.

Pierre Marie Louis Georges Féval, né le 22 août 1867, Paris XI.

Marie Madeleine Jeanne Augustine Féval, née le 12 mai 1869, Paris XVII, deviendra elle aussi religieuse.

Si tu ne viens pas à Lagardère...

Au cours de sa carrière, Paul Féval va toucher à un peu tous les genres de littérature : des récits « bretons » inspirés par l'Histoire, les légendes et l’amour de sa région natale ; des romans « criminels » et policiers (il est d’ailleurs l’un des fondateurs du genre) ; des romans fantastiques ; des romans historiques. Et c’est bien sûr dans la veine du roman historique qu’il devient l’un des maîtres du roman de cape et d’épée.

 

Sa création la plus célèbre est évidemment le Chevalier Henri de Lagardère, héros du non moins célèbre roman Le Bossu. Et pourtant, Paul Féval n’a jamais considéré ce roman comme un chef-d’œuvre, lui préférant Madame Gil Blas, écrit à la même époque mais qui n’eut pas le succès tant espéré.

 

Au succès du Bossu succède une polémique, car le dramaturge Victorien Sardou accuse Paul Féval de ne pas être le véritable auteur du roman !

Voici ce qui s’est passé : en 1854, Féval propose à Sardou d’écrire une pièce de théâtre intitulée Le Bossu. Mais l’écrivain, alors en pleine dépression, ne tarde pas à cesser d’écrire et Sardou, plus très emballé, laisse tomber la pièce à son tour. En 1856, Féval, guéri, demande à Sardou l’autorisation d’utiliser la pièce pour écrire un roman. Sardou, qui est passé à autre chose et qui n’a pas besoin d’écrire une pièce en collaboration avec Féval pour avoir du succès, accepte sans hésiter. Le roman est publié dans Le Siècle, connaît un succès fulgurant et, en 1862, Féval l’adapte pour le théâtre : il pense d’abord à Sardou pour collaborer à l’écriture, mais celui-ci laisse rapidement la place à Anicet Bourgeois, qui a déjà collaboré et collaborera encore à plusieurs pièces de Féval.

 

Avec cette polémique, Féval et Sardou, laissant les épées à leurs personnages, se livrent à un véritable duel d’articles dans les journaux. Et l’histoire se tassera rapidement, chacun des deux auteurs passant à autre chose.

Le crépuscule d'une carrière

Malheureusement pour Féval, le succès finit par lui tourner le dos. A la fin du XIXème siècle, les lecteurs sont de plus en plus friands de romans mettant en scène toutes sortes de crimes atroces. Pour répondre à la demande, certains auteurs n’hésitent pas à rogner sur la qualité des livres qu’ils écrivent. Après avoir parodié cette nouvelle vogue dans des romans comme La Fabrique de crimes ou La Ville-Vampire, et avoir écrit une longue série criminelle en sept tomes, Les Habits Noirs, Paul Féval perd peu à peu la faveur du public.

 

A cela s’ajoute le fait que la critique ne le reconnait toujours pas comme un écrivain digne de ce nom et que ses deux candidatures pour entrer à l’Académie Française se sont soldées par des échecs. Comme si cela ne suffisait pas, Féval est ruiné suite à un mauvais placement en Bourse. Pour un père de huit enfants, c’est une catastrophe. Et il sombre de nouveau dans la dépression.

 

En juin 1876, poussé par son épouse, il se tourne vers un catholicisme particulièrement radical. Lui qui avait toujours été un catholique particulièrement fervent, sombre dans l’extrémisme. Il commence à réécrire certains de ses romans, jugés contraires à sa nouvelle morale. Mais la série noire continue : en 1882, Féval est victime d’un banquier véreux qui le ruine alors qu’il avait réussi à redresser quelque peu sa situation. Paralysé, l’écrivain a de plus en plus de mal à écrire. Et en 1884, sa femme meurt. Paul Féval est emmené chez les Frères de la Saint-Jean de Dieu, où il mourra trois ans plus tard, le 8 mars 1887, presque oublié.

 

Au cours des années suivantes, ses romans « revus et corrigés » continuent de paraître chez les éditeurs mais, à part l’infatigable Bossu, rares sont ceux qui continueront d’avoir du succès. Quelques réalisateurs adapteront quelquefois ses romans, principalement Le Bossu, au cinéma et à la télévision…